Le soir tombait. Les rues du camp étaient désertes. Encore tremblant de la colère qu'il n'avait pu contenir devant le cynisme de Boulard, le colonel Dax éprouvait le besoin de se retrouver seul.Alors qu'il allait ouvrir la porte de son appartement, un vacarme de sifflements, de cris, d'interpellatio...
Hier soir, dès l'aube, un soleil noir illuminait la nuit. Les ombres blanches des arbres s'étiraient comme des ressorts contractés sur le sol plat trop pentu.
Soudain, durant quelques minutes, un blanc corbeau traversa l'horizon, emplissant le silence d'un puissant cri muet.
Deux marcheurs solitaires, main dans la main, couraient, immobiles, figés, fuyants. Leurs calmes paroles animées montaient vers le sol en un enchevêtrement de mots isolés, cacophonie inaudible, perçue au plus profond de leurs plates personnes.
Une voiture électrique au moteur vrombissant déchira la lumière de ses phares opaques, lucioles éteintes, avançant immobiles vers un but indéfini.
La main fermement posée avec délicatesse sur la rigide branche mouvante d'un arbrisseau métallique j'observais, les yeux clos, ce panorama invisible aux blanches couleurs. Mon regard aveugle m'emplissait l'esprit de vacuité, alors que mon âme mortelle se rassasiait de cette absence.
Souple et raide, un chat sauta en rampant par-dessus le fossé en dos d'âne, poussant un rauque miaulement mélodieux.
Les minutes défilant arrêtaient le temps de cet instant suspendu, fermement enraciné au plus haut des nuages.